Archives du mois de janvier 2025

La Cour de cassation consacre la notion de « harcèlement moral institutionnel »

Posté par Caroline Pappo le 31 janvier 2025
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Par un important arrêt du 21 janvier 2025, la chambre criminelle de la Cour de cassation consacre, pour la première fois, la notion de « harcèlement moral institutionnel » au travail.

Dans cette affaire, un syndicat avait déposé une plainte pour harcèlement moral à l’encontre d’une société et de trois de ses dirigeants. Cette plainte portait sur la mise en œuvre d’une politique d’entreprise ayant impacté un quart des salariés, notamment à travers un plan de réduction des effectifs visant la suppression de 22 000 postes, ainsi qu’un plan de mobilité interne affectant 10 000 agents. Y étaient notamment dénoncés les conséquences humaines très lourdes résultant de cette politique avec de nombreux suicides de salariés.

Condamnés en appel pour harcèlement moral institutionnel sur le fondement de l’article 222-33-2 du Code pénal, deux dirigeants se sont pourvus en cassation. En vain.

La chambre criminelle de la Haute Cour confirme la qualification de harcèlement moral institutionnel. Elle estime en effet qu’une telle qualification ne requiert pas que les agissements répétés s’exercent « à l’égard d’une victime déterminée ou dans le cadre de relations interpersonnelles entre leur auteur et la ou les victimes ».  Le fait que l’auteur et la victime fassent partie de la même communauté de travail suffit.

Dès lors, la Cour de cassation considère que constitue un harcèlement moral institutionnel les agissements visant à mettre en œuvre, en connaissance de cause, une politique d’entreprise ayant pour objet la dégradation des conditions de travail de tout ou partie des salariés et ce, pour réduire des effectifs ou atteindre tout autre objectif et qui est susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de ces salariés, d’altérer leur santé physique ou mentale ou de compromettre leur avenir professionnel.

Cour de cassation, chambre criminelle, 21 janvier 2025, pourvoi n° 22-87.145

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Abandon de poste : la présomption de démission validée par le Conseil d’État

Posté par Caroline Pappo le 24 janvier 2025
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Saisi notamment par des syndicats, le Conseil d’État a récemment rejeté la demande d’annulation du décret du 17 avril 2023 mettant en œuvre le dispositif de présomption de démission en cas d’abandon de poste, instauré par la loi dans le secteur privé.

Les Hauts magistrats précisent toutefois que, pour que la démission d’un salarié puisse être présumée, ce dernier doit nécessairement être informé des conséquences que peut avoir l’absence de reprise du travail sans motif légitime, à savoir sa démission présumée et l’absence de droit à l’assurance-chômage.

Ils énoncent, en outre, que le délai que l’employeur doit accorder au salarié pour justifier son absence ou reprendre le travail est d’au moins quinze jours à partir de la date de présentation de la mise en demeure.

Enfin, ils rappellent que l’abandon de poste ne peut pas être considéré comme volontaire en cas de motif légitime, par exemple pour des raisons médicales, l’exercice du droit de retrait ou du droit de grève, le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à la réglementation, ou des modifications du contrat à l’initiative de l’employeur.

Conseil d’État, 18 décembre 2024, affaire n° 473640

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Les SMS envoyés depuis un téléphone professionnel sont présumés professionnels

Posté par Caroline Pappo le 17 janvier 2025
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Un salarié est licencié pour faute lourde. Son employeur lui reproche notamment ses propos critiques et dénigrants visant la société et ses dirigeants, tenus lors d’échanges électroniques et par SMS envoyés au moyen de son téléphone portable professionnel.

Invoquant une violation de son droit à la liberté d’expression et soulignant que ces conservations n’étaient pas destinées à être rendues publiques, le salarié saisit la juridiction prud’homale pour contester cette rupture et faire juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. En vain.

La Cour d’appel juge le licenciement justifié et déboute le salarié de ses demandes d’indemnisation.

Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation confirme cette décision.  Elle juge, d’une part, que le salarié, en désignant par des propos critiques et dénigrants la société et ses dirigeants, a commis un abus dans l’exercice de sa liberté d’expression, peu important le caractère restreint de la diffusion de ces propos ; et, d’autre part, que les sms envoyés par le téléphone professionnel, dont le contenu est en rapport avec son activité professionnelle, bénéficient d’une présomption de caractère professionnel et ne revêtent pas de caractère privé. A ce titre, ces sms peuvent donc être légitimement utilisés dans une procédure disciplinaire, même si les échanges n’étaient pas destinés à être rendus publics.

Cour de cassation, chambre sociale, 11 décembre 2024, pourvoi n° 23-20.716

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Mise à disposition d’un logement de fonction : gare au travail dissimulé !

Posté par Caroline Pappo le 10 janvier 2025
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La fourniture, par l’employeur, d’un logement constitue un avantage en nature.

Il y a donc lieu de l’inclure dans le montant de la rémunération du salarié et d’être indiqué sur le bulletin de paie qui lui est remis.

Tel est le rappel que vient d’effectuer la Cour de cassation.

Dans cette affaire, un employeur avait mis à la disposition d’un salarié un logement de fonction de manière gratuite dans un bâtiment de l’entreprise. Or, la référence à ce logement gratuit était absent des bulletins de paie du salarié.

Licencié, le salarié avait alors saisi la juridiction prud’homale.

Il y a contesté son licenciement et a demandé le paiement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail.

En appel, l’employeur s’était ainsi vu condamné à payer au salarié une somme à titre d’indemnité pour travail dissimulé.

Saisie du litige, la Cour de cassation a confirmé cette décision. Au visa de l’article L. 8221-5, 3° du Code du travail, elle rappelle que la mise à disposition d’un logement de fonction de manière gratuite est constitutive d’un avantage en nature. Celui-ci doit, à ce titre, être évalué pour être soumis à cotisations sociales. Comme cet avantage est absent des bulletins de paie du salarié, elle juge dès lors que c’est à bon droit que les juges, dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation, ont retenu que l’intention de l’employeur de dissimuler était caractérisée.

Cour de cassation, chambre sociale, 4 décembre 2024, pourvoi n° 23-14.259

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